L’Apel et l’Ogec se mobilisent à Lyon pour défendre le financement des collèges
Qu’est-ce qu’un forfait d’externat ?
Un établissement de l’Enseignement catholique a trois sources de financement : les familles, l’État et les collectivités territoriales (voir graphique). Ces dernières versent un « forfait d’externat » : les mairies versent deux forfaits communaux aux écoles maternelles et primaire, les collèges reçoivent un forfait départemental et les lycées un forfait régional. Ces forfaits visent à couvrir des frais de fonctionnement de l’établissement, notamment le matériel et la rémunération du personnel dit « technique », à savoir tous les agents non enseignants, qui sont, eux, rémunérés par l’État.
Comment ce forfait est-il calculé ?
Selon le code de l’éducation, ces contributions forfaitaires sont « versées par élève et par an et calculées selon les mêmes critères que pour les classes correspondantes de l'enseignement public ». En clair, la collectivité calcule la moyenne de ses dépenses et la divise par le nombre d’élèves inscrits dans ses établissements publics. En moyenne sur le territoire français, en 2024, le forfait par élève s’élevait à 1 205 € en maternelle, 645 € en primaire, 647€ pour les collégiens et 828 € pour les lycéens1. Un établissement de l’Enseignement catholique reçoit alors cette somme multipliée par le nombre de ses élèves. Mais selon Pierre-Vincent Guéret, président de la Fédération nationale des Ogec, l’organisme de gestion de l’Enseignement catholique (ou Fnogec), « ce mode de calcul est tellement complexe qu’il laisse une marge d’erreur » qui est, selon lui, prise parfois sciemment.
Pourquoi la question des forfaits fait l’objet d’une polémique ?
L’Enseignement catholique dénonçait, en novembre dernier, un manque à gagner de près de 900 millions d’euros, s’appuyant sur un récent rapport de la Fnogec. En effet, l’organisme évalue de larges écarts dans le calcul des forfaits selon les territoires. Par exemple, selon le rapport, le montant des forfaits départementaux varie de 378 € en Haute-Saône à 1 047 € dans l’Orne. Les collectivités n’ont pas réagi à la publication de ce rapport, mais selon le Réseau français des villes éducatrices (RFVE) ce delta est « le reflet du principe constitutionnel de libre administration des collectivités ».
Pourquoi l’Ogec a saisi le tribunal administratif contre la métropole de Lyon ?
L’Ogec du Rhône a saisi le tribunal administratif de Lyon pour contester la baisse de 45 % du montant du forfait que la métropole de Lyon versera aux 37 collèges de l’Enseignement en 20262. Le montant total de la dotation de la métropole passera de 5,83 millions d’euros en 2025 à 3,24 millions d’euros à partir de 2026. En 2023, la métropole avait fortement augmenté ce forfait à 9,47 millions d’euros pour « accompagner l’explosion du coût de l’énergie », a indiqué le président de la métropole Bernard Bruno lors du Conseil de la métropole ce lundi 15 décembre Selon la métropole, les collèges publics, n’ayant pas utilisé la totalité de cet argent, ont accumulé une trésorerie qui justifie la baisse de la dotation cette année. Or, « les établissements privés sous contrat n’ont pas de réserves comme les autres. La dépense par élève ne mélange pas comptabilité et trésorerie », explique Pierre-Vincent Guéret. Bruno Bernard a regretté ne pas avoir anticipé l’impact de cette décision sur les établissements privés sous contrat : « Nous ne connaissons pas les comptes des collèges privés ».
Quel sera l’impact de cette mesure ?
Cette baisse de la dotation forfaitaire correspond à 2,4 millions d’euros, soit 70 000 euros par établissement. « Il n’y a pas d’argent magique, ironise Pierre-Vincent Guéret, la première chose à faire est de différer les investissements. Deuxièmement, on pourrait ne plus remplacer les départs en retraite. Dans tous les cas, cela affecte la qualité de l’enseignement ». Les chefs d’établissement pourraient également choisir de licencier du personnel – le manque à gagner équivaut environ à deux salaires – ou d’augmenter la contribution des familles de 140 euros cette année scolaire. « Il est rare qu’on augmente le montant des cotisations en cours d’année, mais la tentation est grande de le faire. Au moins tout le monde comprendra l’impact de telles décisions », déclare le président de la Fnogec. Pour Hélène Laubignat, présidente nationale de l'Apel, « Il est normal que la Fnogec se mobilise, mais il est hors de question que les familles soient doublement contribuables ».
Quelle conséquence pour les familles ?
La contribution des familles couvre notamment les frais liés aux bâtiments et à la pastorale. Or, « on a l’impression de payer une seconde fois l’instruction de nos enfants, que nous payons déjà avec nos impôts », réagit Isabelle Lamotte, présidente départementale de l’Apel du Rhône. Les chefs d’établissement pourraient également décider d’adapter la hausse de 140 € de la contribution des familles selon les revenus des familles. Dans le département du Rhône, 70% des établissements calculent le montant de la contribution familiale selon leur quotient familial ou leur avis d’imposition.
1 Le montant plus élevé en maternelle s’explique par la rémunération des Agents territoriaux spécialisé des écoles maternelles (ATSEM)
2 Depuis 2015, les collèges situés sur le territoire de la Métropole de Lyon ne sont plus gérés par le département du Rhône.